Accrocher ses patins à 25 ans
par Alexandra Philibert, Chroniqueuse, Le Magazine All Habs
“I love the game of hockey more than anything and this decision tears me up inside,” Geoffrion says, “but we are talking about my brain.”
MONTRÉAL, QC — C’est ce qu’aurait dit Blake Geoffrion à John Buccigross après avoir avisé la direction du Canadien de Montréal qu’il pensait accrocher ses patins à 25 ans, encore victime quatre mois plus tard de symptômes reliés à la fracture du crâne qu’il a subie le 9 novembre 2012.
Cette soirée là, il jouait au Centre Bell pour les Bulldogs de Hamilton. Il était aussi le meilleur pointeur du club-école. Sa vie a basculé lors d’un plaquage légal mais solide de Jean-Philippe Côté. Sa tête, casque toujours en place, a donné violemment contre la glace mais il avait toutefois pu quitter la glace par ses propres moyens. Cinq heures plus tard et une opération avec une convalescence de huit à 10 mois, un rétablissement complet était prévu.
Il y a près d’un mois, le jeune attaquant ne parlait pas de retraite, il savait que le chemin serait sinueux, mais il espérait encore un retour au jeu comme l’indiquait Richard Labbé le 6 février dernier. Aujourd’hui 13 Mars, la situation en est tout autre.
Qu’est-ce qui a bien pu se passer entre le 6 février et le 13 mars pour que Blake Geoffrion change son fusil d’épaule? Des complications. Pas nécessairement graves, mais juste assez pour lui faire réaliser que même le plus grand amour d’un sport ne vaut pas le péril de sa vie. Le choix est simple : Sa santé ou le hockey. Il est en train de choisir la première option.
Ce possible retrait préventif à seulement 25 ans nous pousse à nous poser des questions sur la multitude de gestes dangereux que nous pouvons voir présentement dans la LNH. Jusqu’où pouvons-nous aller par passion? Combien de commotions cérébrales faut-il pour mettre en péril la santé? Quels joueurs ont, ou auraient du se retirer au bon moment?
Outre ces questions, on s’interroge aussi sur leur après-carrière. Bon nombre de joueurs n’ont pas de scolarité dépassant le cinquième secondaire. Qu’arrive-t-il lorsque le hockey les laisse tomber? Pensez à Darren Boogaard, Rick Rypien ou encore Wade Belak. Qu’arrive-t-il lorsqu’ils ont tout donné pour le hockey mais que celui-ci leur donne rien en retour ? Pensez aux joueurs qui sont partis trop tôt comme Gaétan Duchesne à seulement 44 ans.
Trop peu possède une porte de sortie. Ils peuvent devenir analystes me direz-vous, les places disponibles sont restreintes et ce ne sont pas tous les joueurs qui sont d’habiles communicateurs. Alors, il leurs reste quoi? À quoi peuvent-ils aspirer sans études en prenant leur retraite? Certains, beaucoup même, tombent en dépression car le hockey était toute leur vie.
Heureusement, ce n’est pas le cas de Geoffrion qui possède un diplôme de l’université du Wisconsin. Mais ce n’est pas le cas pour tout le monde. Cet événement devrait pousser le Québec, province où les études ne sont pas mises en importance, à regarder de plus près ses circuits mineurs. Sachant que les chances d’atteindre la LNH sont limitées, pourquoi ne pas donner deux fois plus de chances et d’outils à nos jeunes?
Et malgré tous les questionnements que nous pourrions avoir, nous ne pouvons que saluer le courage et le bon sens dont fait preuve Blake Geoffrion en mettant sa santé avant tout le reste.
Pour mieux comprendre l’impact d’une telle blessure et la convalescence de Geoffrion je vous invite à lire The quiet Room : Blake Geoffrion écrit par Jo Ines sur The Score, ainsi que mon texte La Décision de Blake Geoffrion, qui parle de qualité de vie.